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    Laura Amakabresku

     

     

    Nous sommes des individus à la recherche de reconnaissance  

     

      Notre relation avec le monde est une relation physique, sensorielle et affective. 

    L'idéologie des années soixante était de changer le monde ; aujourd'hui c'est de changer mon corps avec de la cosmétique, chirurgie, implants et diètes. 

    Aujourd'hui le corps est comme une prothèse de notre identité. Une représentation "souhaitée" de notre personne. 

    Les tatouages sont une bonne illustration : chacun prétend se différencier avec le sien, mais les graphismes étant limités, il y a des millions de personnes qui portent le même. C'est une bonne métaphore du monde actuel. 

    D'autre part, notre monde est celui d'une humanité assise face aux écrans, le volant des voitures...comme si le corps serait quelque chose d'inutile, superflue, anachronique. 

    La marche à pied est une forme de résistance ; une façon de retrouver la jouissance sensorielle du monde : voir, observer, minimiser l'action en éliminant toute appréciation inutile. 

    C'est bénéfique, car au moment de quitter la maison, nous sommes immédiatement intervenus par des critères utilitaristes, qui définissent à ta place où tu dois aller, le parcours et le moyen de transport. De même, le silence est une autre forme de résistance; de protéger une dimension intérieure face à des agressions externes. 

    La culture industrielle et massifiée qui cherche principalement le bénéfice, ne nous apprend pas à penser le monde, mais à le reproduire. Elle est plus présente dans le bruit continu que dans la conversation ou le silence. 

    De là, la nécessité de disparaître de soi même, qui signifie: ne plus supporter les responsabilités inhérentes à notre identité sociale, professionnelle, amicale, familiale... 

    C'est le sentiment d'être saturé de soi même, de cet effort permanent qui nous pousse finalement à fouir, à ne plus être là. 

    Il y a quelques pratiques comme marcher, voyager ou se dédier à la jardinerie, et d'autres plus douloureuses comme la dépression ou les drogues. Chacun de nous est un continent et, certains d'entre nous refusent les ponts. 

    Chacun de nous est immense. Nous avons des innumérables personnalités qui se manifestent selon les circonstances, mais nous vivons dans un monde de repli sur nous mêmes et dans un monde virtuel. 

    Nous avons délaissé la conversation, car la communication par le biais des moyens technologiques est purement utilitaire. La conversation implique le corps, le visage, la voix, la présence, l'attention envers l'autre. La conversation est l'un des valeurs les plus menacées et appréciées en notre actualité. 

    Nous sommes créatures chargées d'émotions, de signification. Seul existent les interprétations que nous faisons du monde qui nous entoure et, cependant, sans nos regards le monde n'existe pas. Et il y a des millions d'interprétations qui sont soumises à la médiatisation. 

    Le souhait de retourner vers la nature est une réalité qui correspond à un besoin de changement des valeurs. Le nombre de personnes qui marchent sur le monde augmente et, ces marcheurs sont solidaires et ouverts. 

    Dans cette marche nous rencontrons  cette dimension collective et en même temps la dimension individuelle ; une façon de ne pas nous laisser voler notre temps. Mais nous devrions éviter de voir le monde comme ceci ou cela, mais plutôt comme ceci, cela et puis encore.

    Les chiffres font peur : un entre cinq adolescents se trouve en situation de stress et tombe en conduite à risques; d'autres, dans le consumérisme. 

    La recherche volontaire du coma pendant les saouleries, les crises alimentaires, la violence, la toxicomanie, dans les proportions actuelles, sont récentes.

    Les jeunes aujourd'hui sont désorientés, ils ignorent leur avenir, ils ne sont pas sûrs de la valeur de leurs vies ; ils doutent de leur place dans ce monde et ils vont la chercher ailleurs. Le consumérisme essaie de colmater cette brèche en les donnant des points de référence.  

    La globalisation est un fait, donc nous devrions devenir de plus en plus des citoyens du monde ; malgré cela, nous perdons le sentiment de solidarité. Nous sommes des individus à la recherche de la reconnaissance. 

     

     

    David Le Breton est professeur de Sociologie et Anthropologie à l'Université de Strasbourg 

    Ima Sanchís/ La Vanguardia 07/01/2020

     

     

     

     

     


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     Qin

     

     

        L'ordre, il est dans la culture, dans la société. Et certes, la déprogrammation génétique est liée à la programmation socioculturelle, au système de normes et d'interdits, aux règles d'organisation de la société. Mais depuis notre arrivé dans notre ère historique, nous connaisons des sociétés instables, avec leurs antagonismes internes, les luttes pour le pouvoir, les conflits extérieurs, les destructions, supplices, massacres, exterminations, à ce point que le bruit et la fureur constituent un trait majeur de l'histoire humaine.

      Ainsi, les désordres historiques apparaissent à la fois comme lexpression et la resultante d'un désordre sapiental originaire. Contrairement à la croyance reçue, il y a moins de désordre dans la nature que dans l'humanité. Dès lors qui surgit la face de l'homme cachée par le concept rassurant et emollient de sapiens. C'est un être d'une affectivité intense et instable qui sourit, rit, pleure, un être ansieux et angoissé, un être jouisseur, ivre, extatique, violant, aimant, un être envahi par l'imaginaire, un être qui sait la mort et ne peut y croire, un être qui sécrète le mythe et la magie, un être possédé par les esprits et les dieux, un être qui se nourrit d'illusions et de chimères, un être subjectif dont les rapports avec le monde objectif sont toujours incertains, un être soumis à l'erreur, à l'errance, un être qui produit le désordre.

     Tout animal dotté de ces tares démentielles, aurait été sans doute éliminé impitoyablement par la sélection darwinienne. Pour le biologisme et l'anthropologisme, il est inconcevable qu'un animal qui consacre tant de ses forces à jouir et à s'énivrer, qui perd tant de temps à enterrer ses morts, accomplir des rites, danser, décorer, si mal ajusté dans son rapport avec l'environement et avec lui même, ait pu, non seulement survivre, mais accomplir, dans l'univers hostile, dans le froid des glaciations, des progrès techniques, intellectuels et sociaux décisifs.

     On ne peut plus imputer désordres et erreurs aux insuffisances naïves, aux incompétences de l'humanité primitive, que réduiraient progressivement l'ordre policé et la vérité civilisée. Le processus est bien plutôt, jusqu'à aujourd'hui, inverse. On ne peut plus opposer substantiellement, abstraitement, raison et folie. Il nous faut, au contraire, surimposer au visage sérieux, travailleur, appliqué d'homo sapiens, le visage à la fois autre et identique d'homo demens. L'homme est fou-sage. La vérité humaine comportr l'erreur. L'ordre humain comporte le désordre.

      Dès lors, il s'agit de se demander si le progrès de la complexité, de l'invention, de l'intelligence, de la société se sont faits malgré, avec ou à cause du désordre, de l'erreur, du fantasme. Et nous répondons à la fois à cause de, avec et malgré, la bonne réponse ne pouvant être que complexe et contradictoire.

     

     

     

    Edgar Morin / La complexité humaine

         

         

          


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    Charlie and Melody Wambeke

     

     

     

    5,4 millions d'enfants meurent chaque année avant de fêter leur cinquième anniversaire. En 1950 étaient 19,6 millions. Traditionnellement on a depuis longtemps utilisé ces données pour mesurer l'évolution globale dans le monde et, de fait la réduction de ce chiffre est considéré l'une des plus grosses avancées de l'humanité. 

    Cependant, les écarts sont abismaux selon le lieu de naissance et pire : les territoires à risque il a 50 ans, sont les mêmes qu'aujourd'hui. Un enfant née maintenant en République Centrafricaine a  2.500% plus de chances de mourir que s'il naît à Cuba. Ce sont les deux pays  qui représentent les deux extrêmes en mortalité enfantine, selon un étude publié par Nature récemment. Cet étude a été fait seulement sur les pays pauvres ou en développement. 

    " Cette disparité est due à plusieurs facteurs : démographiques, économiques, politiques, malnutrition… " , selon Simon Hay, responsable de cet étude et professeur à l'Université de Washington. Cet étude très détaillé à niveau globale, ne retient pas les données nationaux uniquement, mais par première fois élargie les statistiques aux différentes régions de ces mêmes pays entre 2000 et 2017, démontrant des fortes inégalités par secteurs géographiques.  

    "La combinaison de données nationaux et locaux peuvent être plus utiles aux Ministères de la Santé, pour mieux savoir où il faut investir l'argent pour améliorer les services. En plus de mieux localiser les décès, nous apprenons mieux les causes de mortalité". Des nombreuses campagnes de protection enfantines s'adressent aux enfants âgés de 5 ans ou plus. Cet étude révèle que le taux de mortalité plus important parvient pendant la première année de vie.  

    Dans les endroits où des investissements en éducation, formation de personnel soignant, prestations sociales et accès au système sanitaire ont été menés, les avancées se multiplient. Exemple le Rwanda : en 2000 muraient 144 enfants sur 1000 dans le meilleur des cas ; maintenant sont 57 dans le pire. Des investissements ont été faits sur les enfants les plus pauvres du pays, la sécurité sociale atteint à d'avantage de familles et le nombre de travailleurs communautaires a augmenté. 

    Le personnel soignant est fondamental. Il faut améliorer la couverture sanitaire. Dans la plus part des pays pauvres il y a très peu de docteurs. Au Mozambique par exemple, pour 29 millions d'habitants, il y a  1.200 médecins seulement et, la moitié travaillent au ministère et n'ont pas d'accès aux patients. Les pays au cœur du Sahel sont les endroits les plus dangereux pour naître actuellement.

     

     

    Patricia Peiró / Madrid /El País octobre 2019

     

      

     

     

     

     

     


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    Cette île me plaît, depuis ce moment à l'aube quand elle apparut sur l'horizon. Les formes des montagnes et ses petites côtes bien protegées, sont une invitation pour y rester.

    Mon île est gracieuse quand il fait beau ; mélancolique quand le ciel est gris et lugubre quand le ciel pleure. Mais dans la vie, tout est comme ça non?. Près de la plage il y a une lagune d'eau salée où habite une colonie de flamencs.

    J'ignore pourquoi, mais dans mon île déserte le coeur tremble facilement et, les états d'âme se renouvellent comme l'air que je respire.

     

     

    Empathie et humanisme 09/10/2019

     

     

    Je marche. Promène. Gravis des montagnes. Observe les oiseaux. Je caresse les bébés phoques. Pêche des crabes. Cours nu sur la plage. M'assois sur les rochers. Je regarde depuis les falaises les évolutions des raies géantes. Espionne les soleil qui s'en va. Me cache et regarde sans être vu les flamencs qui se baignent. M'en dors sur le sable. Me réveille. Je ris. Et puis, souris aux étoiles.

    C'est tout. Je suis dans mon île déserte

     

    Île Ràbida

     

     

    Julio Villar/Cahier d'un navigant solitaire

     

     

     

     

     

     


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    Entropie

    Peter Stewart

     

     

    "L'enfant et l'homme de la rue croient que l'accès au réel est immédiat: l'idée de l'existence de ce caillou ou de cette chaise leur paraît claire et évidente et ils ne conçoivent guère que puise être mise en cause son caractère d'absolu et, même s'ils croient aux contes de fées."

    B. d'Espagnat

     

    "Le terme d'entropie est une notion abstraite empruntée au courant systémique. Il désigne le degré d'incertitude ou de désordre dans l'arrangement des éléments du système que constitue une organisation."

    Jean Heutte

     

    "Il faut donc organiser notre société sans la nécessité du recours à la majorité, et donc de manière à ce que les bonnes volontés (sources d'énergie) puissent s'exprimer individuellement ou en minorités. Travailler à un niveau plus faible d'entropie, pour pouvoir en récupérer les fruits. La liberté individuelle est peut-être trop récente pour que nous ayons les bons outils pour en profiter."

    Liger/Agora Vox 

     

     

     

     

     

     

     


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