• Empahtie et humanisme / 5

    Empahtie et humanisme / 5

     

    J'ai entendu un long soufflement,  comme un déplacement d'eau et, laissant d'un geste ce livre que je suis en train de lire, je suis sorti rapidement dehors.

     

    Sur la mer se promènent des lentes et interminables ondes. Une perceptible brise leurs apportent quelque chose de spéciale. L'horizon, avec des changements dans ses couleurs, n'est pas plat, sinon qu'il est comme une succession capricieuse de petits mirages. On dirait que les cellules de la planète ont envie de bouger, de s'unir, de danser ensemble, se balançant dans des impressionnants et parcimonieux va-et-vient.

     

    Le soleil monte. Au centre du ciel, en haut de sa coupole, le bleu est intense et pur, pendant qu'il perd sa force et pâlit, là où il s'appui sur la ligne de la mer.

     

    Resplendissant et arrêté, un petit nuage blanc flotte dans la matinée. Le soufflement que j'ai entendu était certainement une illusion.

     

    J'ai entendu à nouveau ce long soufflement. Un gros poisson bouge sous la coque de mon bateau et cela, me produit des frissons, et éveille en moi une peur pleine de curiosité.

     

    Cette fois-ci je sors juste à temps d'apercevoir trois immenses tourbillons ronds, à la surface lisse mais agitée, comme des eaux bouillantes. Fbss...fbss...

     

    Et la tête d'un cachalot surgit énorme, aplatie et souriante. Et un corps interminable commence à glisser sans fin. Une ailette obscure, mate, âpre, coupe les eaux à la fin et le tout disparaît sous la mer.

     

    Mon bateau est très petit à côté de cet énorme animal. Tout mon être, mon corps, se soustraient à la vie, et mes réflexes s'arrêtent, statiques, devant cette vision préhistorique et irréelle. Des vibrations de peur amusée passent à travers moi.

     

    Face au bateau bougent, pas un, si non sept ou huit cachalots. Leurs longs corps, quand ils sortent pour respirer, reluisent et brillent au soleil. Ils ont au moins dix mètres de long, et moi, j'essaie de ne pas penser aux conséquences, si l'un parmi eux aurait l'idée de venir se gratter le dos contre la coque de mon bateau. Mais je reste confiant, car je me sens à ma place. Comme eux.

     

    Nos destins se sont donnés rendez-vous aujourd'hui.

     

    Je grimpe en haut de mon mât et, assis sur la croisette, avec les pieds plongeant dans le vide, et regardant les têtes de mes amis, je leurs dis en mettant toute mon affection dans ma voix : - Eh !  Eh !  Eh !  Et ils me répondent : - Fhss...Fhss...Fhss...

     

     

     

     

     Julio Villar / Eh Pétrel / Cahier d'un navigant solitaire

     

     

     

     


  • Commentaires

    1
    Vendredi 4 Mars 2016 à 14:31

    J'ai beaucoup aimé ce passage, moi aussi  yes.

    Amitiés,

    Sérénita

      • Vendredi 4 Mars 2016 à 17:32

        Bonjour Sérénita,

        J'espère que votre santé est au beau fixe. Merci.

        Amitiés,

        Angel

      • Vendredi 4 Mars 2016 à 19:16

        Bonsoir Angel,

        Tout est rentré dans l'ordre, merci beaucoup smile.

        Amitiés,

        Sérénita

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    2
    Samedi 5 Mars 2016 à 19:10

    Bonsoir Sérénita,

    J'ai trouvé l'illustration de Villar qui accompagne ce passage. Je viens de l'insérer.

     Amitiés

    Angel

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